Comment?
Dans ma salle de classe
Pour promouvoir l’enseignement plurilingue des STIM, le personnel enseignant élabore des corpus comprenant des exemples variés issus de différentes langues, cultures et contextes géopolitiques. Ces corpus peuvent inclure des éléments tels que l’origine des termes scientifiques ou des décodages basés sur les méthodes précises utilisées dans d’autres systèmes linguistiques et culturels, notamment la lecture inversée de phrases mathématiques dans des systèmes arabophones tout en respectant les règles de priorité des opérations arithmétiques (soit, en français, 2 × 5 + 4 = 14 et, en arabe, 14 = 4 + 5 × 2). L’analyse comparative des exemples présents dans ces corpus permet aux élèves d’affiner leur compréhension et leur maîtrise des concepts fondamentaux, tout en développant leur capacité à penser de manière critique et à résoudre des problèmes de manière créative (pour plus de renseignements, voir Wattar et Le Pichon, 2022).
En adoptant cette approche, les personnes enseignantes encouragent une réflexion métacognitive chez les élèves qui confrontent alors les méthodes d’application utilisées dans leur propre système francophone avec celles des autres cultures. Cette comparaison favorise une prise de conscience des différentes perspectives scientifiques et mathématiques, ainsi qu’une meilleure appréciation de la diversité linguistique et culturelle. Les élèves explorent ainsi les méthodes et les approches spécifiques utilisées dans des contextes linguistiques et culturels différents, ce qui élargit leur vision du monde et développe leur capacité à résoudre des problèmes de manière créative. En somme, l’enseignement plurilingue des STIM enrichit l’expérience éducative des élèves en élargissant leur compréhension du monde et en leur permettant d’apprendre de façon plus flexible et avec une ouverture d’esprit.
Règle d’or :
Ne jamais assigner une langue ou une culture à l’élève, mais lui laisser choisir ses langues et cultures d’appartenance. Poser par exemple des questions telles que :
- Dans quelle langue est-ce que tu aimes compter? Et tes grands-parents, ils comptent en quelle langue? Est-ce que tu sais le faire aussi?
- En quelle langue souhaites-tu travailler?
Conseils :
N’hésitez pas à consulter vos élèves! Par exemple, certaines langues, notamment le mandarin, utilisent des caractères qui ont une signification en eux-mêmes et qui sont associés pour former un mot. Vous pouvez inviter vos élèves qui comprennent ces langues à expliquer chacun des caractères, ce qui contribuera certainement à clarifier le sens des concepts. Par exemple, le concept de gravité est décrit à l’aide de deux caractères (重力 zhòng lì) qui expriment le poids et la force en chinois. Vos élèves s’en souviendront!
Questions :
- Suis-je au courant des langues des répertoires de mes élèves?
- Est-ce que je m’interroge sur l’origine des théories que j’enseigne? Est-ce que je communique mes découvertes à mes élèves? Par exemple, de quand datent les chiffres dits arabes que nous employons encore aujourd’hui? Quelles sont les différentes représentations graphiques des chiffres utilisées dans le monde aujourd’hui? Qui, dans le groupe-classe, les connaît?
- Est-ce que je m’interroge sur les conséquences de la provenance géographique de mes élèves? Certains pays sous l’équateur ne connaissent pas les quatre saisons. Dans ces pays, le soleil se lève et se couche tous les jours à la même heure. Quelle conséquence cela peut-il avoir sur l’interprétation du temps qui passe? de l’heure qu’il est? Par exemple, pour un rendez-vous à huit heures du matin en Éthiopie, on vous donnera rendez-vous à deux heures (deux heures après le lever du soleil).
- Est-ce que j’implique mes élèves dans la préparation des leçons? Est-ce que je favorise la mise en commun des connaissances linguistiques et culturelles de mes élèves pour qu’elles et ils se sentent valorisés?
Bref, faites preuve de curiosité et faites-le savoir! N’hésitez pas à utiliser Internet pour effectuer une recherche rapide sur ces termes. Il vous sera d’un grand secours pour mieux comprendre ces différences et profondément décentrer votre enseignement.
Ressources complémentaires
Sur le site Web des projets ESCAPE (Enseigner les SCiences Aux élèves PlurilinguEs), vous trouverez une série de ressources pour enseigner les mathématiques et les sciences en utilisant une approche plurilingue et pluriculturelle, y compris des plans de cours proposant une variété d’activités. Vous trouverez aussi des explications des programmes STIM de l’Ontario en plus de dix langues, dont le pashto, le turc, l’arabe, le mandarin, le bengali, le coréen, l’ourdou, l’espagnol ou encore le dari/persan.
La ressource Binogi est en constante évolution et propose des cours de mathématiques, de sciences et autres, alignés sur les programmes scolaires de l’Ontario et traduits à la fois dans la langue de l’école et dans celle des élèves (y compris dans des langues peu traduites, comme le dari ou le tigrinya). Cela permet aux élèves de passer d’une langue à l’autre et surtout de communiquer les contenus d’apprentissage à leurs parents. Cette approche fluide leur donne l’occasion d’approfondir la compréhension du contenu et de stimuler leur mémoire, y compris la mémoire des termes dans la langue de l’école, le français. Pour aller plus loin, voir Le Pichon, Cavalcante et Cummins, 2022; Le Pichon, Vorstman et Cummins, 2021; Auger et Le Pichon, 2021.
Les activités de découverte des apports historiques des différentes civilisations (cycles moyen et intermédiaire, et niveau secondaire) servent également à encourager les élèves à découvrir les origines linguistiques et historiques d’un concept en faisant des recherches sur Internet. Par exemple, le mot algèbre vient du mot arabe al -jabr. Son histoire est la suivante : « Le mot algèbre vient du titre du célèbre traité d’un mathématicien persan du IXe siècle, Kitab al-Jabr Wa l-Mugabala, qui se traduit approximativement par "Le livre du raisonnement et de l’équilibre". Construit à partir des systèmes grecs et hindous, le nouvel ordre algébrique était un système unificateur pour les nombres rationnels, les nombres irrationnels et les grandeurs géométriques. Le même mathématicien, Al-Khwarizmi, a également été le premier à introduire le concept d’élévation d’un nombre à une puissance. » Traduit librement de The Compendious Book on Calculation by Completion and Balancing
Les ethnomathématiques englobent diverses notions relatives à l’histoire des mathématiques, à leurs origines culturelles, aux mathématiques sous-jacentes aux situations quotidiennes et à l’enseignement de cette discipline. D’un point de vue pédagogique, cette approche préconise que l’enseignement des mathématiques soit en harmonie avec les mathématiques présentes dans le contexte culturel familier des élèves. Elle est déjà présente dans l’enseignement des STIM en Suisse depuis plus de vingt ans (voir Dasen, Gajardo et Ngeng, 2005). L’objectif n’est pas de remplacer une forme d’apprentissage par une autre, mais que les élèves s’ouvrent à la diversité de la pensée mathématique et scientifique (voir le clin d’oeil Compter en maya).
Pour de nombreuses activités, l’approche plurilingue consiste simplement à présenter des éléments culturels venus d’ailleurs. Par exemple, pour les cycles du palier élémentaire :
Maths – de la maternelle à la 1re année : Exploration des séquences
L’activité proposée sur ce site est destinée aux jeunes enfants. Elle peut être reproduite en utilisant des musiques du monde.
Maths – de la 2e à la 4e année : Un cuisinier averti en vaut deux
De nombreux cuisiniers et cuisinières font des mathématiques sans s’en rendre compte, par exemple en adaptant, pour six personnes, une recette conçue pour quatre personnes. Pour donner à cette activité une dimension multiculturelle, demandez aux élèves de venir à l’école avec leur recette préférée pour quatre personnes. Demandez-leur ensuite de calculer les quantités pour six personnes.
Sciences – de la 4e à la 7e année : La lune éclaire nos nuits
L’ensemble du document que vous trouverez ici peut être utilisé dans des zones géographiques variées : la position de la lune peut être calculée en fonction de la région du monde choisie. À partir de la page 22, le document explore les différents calendriers lunaires du monde : belle occasion pour vos élèves de faire le tour du monde et de s’émerveiller de la diversité des apports culturels scientifiques tout en se décentrant.
Toutes les disciplines et tous les cycles :
Le détective de mots : l’idée ici est que les élèves ajoutent des expressions, des définitions ou des termes présentés dans leurs langues aux côtés de leur équivalent en français. Ce répertoire contribue à favoriser la compréhension et la rétention de ces concepts par les élèves ainsi que leur diffusion, et l’accessibilité des familles et des communautés aux programmes scolaires.
Une affiche sur la chaîne alimentaire animale : la personne enseignante proposera aux élèves de compléter ces listes par un équivalent dans leur propre langue, dans le cadre d’une activité commune par exemple. Les images aident à faciliter la compréhension et la mémorisation. L’affiche sera ensuite apposée sur un mur de la salle de classe jusqu’à la fin du trimestre afin de faciliter le passage d’une langue à l’autre.
Une affiche sur les gaz à effet de serre : la personne enseignante proposera aux élèves de compléter ces listes par un équivalent dans leur propre langue, dans le cadre d’une activité commune par exemple. Les images aident à faciliter la compréhension et la mémorisation. L’affiche sera ensuite apposée sur un mur de la salle de classe jusqu’à la fin du trimestre afin de faciliter le passage d’une langue à l’autre.
Le Guide d’initiation aux approches plurilingues (p. 62) propose une activité à partir du mot triangle dans plusieurs langues et dans l’optique de travailler les préfixes et le radical des mots en mathématiques.